"La 3e Conférence mondiale sur les océans, les côtes et les îles, qui s'est tenue au siège de l'Unesco à Paris, devait s'achever, vendredi 27 janvier, sur une série de recommandations destinées à promouvoir un usage durable des océans. Tout au long de la semaine, plusieurs centaines de scientifiques, de membres d'organisations non gouvernementales ou de responsables de 78 pays ont débattu des maux dont souffrent les milieux marins et des solutions à mettre en oeuvre pour y remédier" (...) [via Le Monde]
La première urgence est de préserver la biodiversité des écosystèmes marins. Celle-ci s'affaiblit à un rythme inquiétant. "Ce phénomène est désormais tangible et visible, souligne Awni Behnam, président de l'International Ocean Institute. Dans certaines zones, non seulement les stocks de poissons sont en baisse, mais là où l'on capturait auparavant une dizaine d'espèces différentes, on en trouve aujourd'hui parfois moitié moins."
Les mécanismes capables d'enrayer l'effondrement de cette biodiversité passent par la protection de la haute mer, qui subit les dégradations les plus importantes. Au-delà de 200 milles nautiques des côtes, les océans ne dépendent en effet d'aucune juridiction ni ne relèvent d'aucune forme de gouvernance. "C'est un des principaux enjeux de la Conférence, rappelle Julian Barbiere, membre de la Commission océanique intergouvernementale de l'Unesco. Il faut définir un cadre légal de protection de la haute mer. On peut penser à des aires marines protégées ou à une série de protocoles inscrits dans la convention des Nations unies sur le droit maritime."
De nombreux participants ont plaidé pour que la mise en place d'un cadre réglementaire protégeant la haute mer soit accompagnée d'un réseau international de surveillance de ces zones. L'objectif est de lutter contre le chalutage de grand fond, une technique de pêche — légale — consistant à labourer le fond des océans à l'aide de filets pour accroître les prises. Elle conduit, collatéralement, à détruire des écosystèmes qui gardent une grande part de leurs mystères. "Nous détruisons quelque chose que nous n'avons pas encore découvert", résume M. Behnam. "Un autre enjeu du forum est de trouver les moyens de réglementer la bioprospection, dit M. Barbiere. Car certaines entreprises de biotechnologies prospectent les grands fonds, de manière plus ou moins destructrice, à la recherche d'organismes encore inconnus pour en tirer des applications commerciales."
D'autres constats se font jour, qui sont notamment liés à l'impact du changement climatique sur les milieux marins. "Certains modèles scientifiques évoquent désormais une montée maximale du niveau des mers de deux mètres à la fin du siècle, alors qu'en 2001, les prévisions ne mentionnaient qu'un maximum d'un mètre, dit M. Barbiere. Il faut que cette donnée soit prise en compte dans les politiques d'aménagement du territoire."
D'autres travaux scientifiques viennent noircir encore l'état des lieux. Désormais mesuré, le ralentissement de certains courants marins, au premier rang desquels la dérive nord Atlantique, pourrait remettre en cause la régulation thermique des océans et provoquer des bouleversements importants dans les écosystèmes.
Un des constats les plus alarmants concerne l'acidification des océans en raison de l'absorption du dioxyde de carbone (CO2) excédentaire issu des activités humaines. Les récifs coralliens — principalement constitués de calcaire et lieux de riches écosystèmes — sont les premiers menacés. Certaines espèces de plancton sont également, à terme, en danger et, comme le rappelle M. Behnam, "si le plancton disparaît, c'est le poisson qui disparaît". Or si certaines pratiques humaines sont encore modifiables, aucune recommandation d'un forum des Nations unies n'endiguera les tendances liées au réchauffement climatique.
[Stéphane Foucart]
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