"Si on veut vraiment changer les choses, si on veut vraiment changer le regard que le monde porte sur nous et, ainsi, espérer nous offrir un avenir, il faut prendre des mesures concrètes d'humanisation, et non se contenter d'en parler (...)."
Le parcours du combattant de l'exclu comporte plusieurs stades.
Pour le premier, les centres d'urgences ou asiles de nuit, quelques réformes de bon sens permettraient d' "humaniser" l'institution et de sauver de nombreuses vies.
1. Il faut abolir le système actuellement en place qui veut que nous ne puissions pas rester dans ces centres plus de quinze jours. C'est une limite absurde ou vexatoire qui ne devrait pas exister. Ce dont nous avons besoin, c'est que ces centres nous acceptent sans limite de temps. C'est le point de départ pour que nous puissions acquérir ce dont nous manquons tant et, ainsi, engager un processus de réadaptation à long terme.
2. A chaque réunion de ces centres, les exclus devraient être représentés par d'autres exclus. Si ces centres sont faits pour nous, pour nous venir en aide, la moindre des choses est que nous puissions dire ce qui nous paraît manquer ou ne pas fonctionner.
3. Pour abolir la surgetthoïsation, ces centres devraient accepter tous les cas de figure qui se présentent : femmes seules, hommes seuls, couples, personnes avec animal, etc. La rue est aussi diverse que l'humanité elle-même. Personne ne songerait à imposer de ségrégation dans les immeubles. Pourquoi devrions-nous la subir ? Aurions-nous cessé d'être humains pour qu'on nous parque, les hommes d'un côté, les femmes de l'autre ?
4. Il faut abolir les dortoirs, pour respecter le droit à l'intimité des exclus. Là encore, il s'agit d'un principe élémentaire. Ces dortoirs ne nous permettent pas de sortir de la rue, ils nous y renvoient. Il nous font comprendre que nous ne sommes rien, que du bétail que l'on parque pour la nuit, et ils attisent notre révolte.
5. Chaque centre doit être pourvu de chambres d'enfants, afin que l'exclu qui y a résidence puisse exercer son droit parental en cas de séparation. L'une des raisons majeures qui conduisent un gars dans la rue est un divorce malheureux suivi d'une séparation d'avec ses enfants. Or les conditions qui lui sont faites dans la rue sont telles que très vite il se trouve dans l'impossibilité d'exercer son droit de garde et que ce qui l'avait provisoirement poussé à la rue devient, pour lui, une condamnation définitive.
6. En période d'hiver, il faut que l'on puisse partir vers dix heures et non vers sept heures comme c'est le cas actuellement. On m'explique qu'on nous jette dehors pour le ménage. C'est un faux problème. Il suffit de prévoir une pièce où l'on pourrait se rassembler et libérer ainsi les parties communes.
7. Il doit y avoir une meilleure formation du personnel, notamment des gardiens de nuit, et que le personnel associatif nous manifeste plus d'humanité. Qu'il nous accepte comme nous sommes, hommes et femmes, et qu'il arrête de nous traiter en irresponsables ou en « criminels ». Tout le monde sait que se retrouver à la rue n'est pas un crime. Pourtant, les règlements et les comportements à notre égard ressemblent étrangement à ceux des prisons ou des maisons de redressement. Est-ce la meilleure manière pour nous aider ?
8. Il est nécessaire que les centres conservent des dimensions humaines, destinés à recevoir entre vingt-cinq et quarante personnes. Comme pour les quinze jours ou les dortoirs, cette exigence a pour but de permettre à l'exclu de se sentir mieux, considéré comme un homme et pas comme une bête, et ainsi de pouvoir commencer sa reconstruction.
9. Il faut que le personnel minimal soit constitué par : un psychologue, un alcoologue, un médecin, une assistante sociale pour remplacer les matons qui nous répriment. De deux choses l'une : soit on veut nous aider à nous sortir de notre misère, soit on se contente de la gérer. Mais si on choisit de simplement la gérer, notre misère va coûter beaucoup plus cher à la collectivité, puisque, en agissant ainsi, on nous maintient dans la rue à vie. Il est vrai que la rue ne fait pas de cadeaux et que nous y mourons. Mais alors, il faut avoir le courage de l'avouer : nous gérons votre misère jusqu'à ce que vous creviez.
10. Chaque centre dit « d'urgence » doit être pourvu d'un lieu adéquat pour pallier la clochardisation à l'extrême et éviter la ghettoïsation. Il y a malheureusement toutes les sortes de dégradations dans la rue. Certains d'entre nous se trouvent dans des états si déplorables que même nous, nous avons du mal à les accepter. Faut-il pour cela les abandonner ? Ce sont nos frères sur lesquels le malheur s'est acharné.
11. Il faut que ces lieux soient pourvus d'un vestiaire pour pouvoir nous changer car l'exclusion fait que nos habits sont très endommagés, et une annexe doit être créée près du centre pour le repas de midi, afin d'éviter l'éloignement qui remet en cause la réadaptation. Le premier problème du clochard est l'absence de repères, l'instabilité. Occupés à courir partout pour régler nos problèmes, nos papiers, pour trouver de quoi manger et où dormir, nous menons une existence de bête traquée. Nous qui n'avons rien, aucun endroit pour nous reposer, pourquoi nous obliger encore à traverser la ville pour manger, nous habiller ou dormir ? Enfin, pour éviter la surconsommation d'alcool pendant l'attente avant d'entrer au centre -où par conséquent les exclus boivent avec excès-, il faut qu'ils puissent boire en mangeant. C'est une question de vie ou de mort. L'interdiction d'alcool dans les foyers est un règlement hypocrite qu'il faut casser. Tout le monde sait très bien qu'une fois hors du foyer, tous ceux à qui on a interdit de boire vont picoler encore plus.
Voilà quelques-unes des réformes, du simple bon sens, qu'il faudrait appliquer aux asiles de nuit et qui apporteraient, dans les faits, cette humanisation."
Pour le premier, les centres d'urgences ou asiles de nuit, quelques réformes de bon sens permettraient d' "humaniser" l'institution et de sauver de nombreuses vies.
1. Il faut abolir le système actuellement en place qui veut que nous ne puissions pas rester dans ces centres plus de quinze jours. C'est une limite absurde ou vexatoire qui ne devrait pas exister. Ce dont nous avons besoin, c'est que ces centres nous acceptent sans limite de temps. C'est le point de départ pour que nous puissions acquérir ce dont nous manquons tant et, ainsi, engager un processus de réadaptation à long terme.
2. A chaque réunion de ces centres, les exclus devraient être représentés par d'autres exclus. Si ces centres sont faits pour nous, pour nous venir en aide, la moindre des choses est que nous puissions dire ce qui nous paraît manquer ou ne pas fonctionner.
3. Pour abolir la surgetthoïsation, ces centres devraient accepter tous les cas de figure qui se présentent : femmes seules, hommes seuls, couples, personnes avec animal, etc. La rue est aussi diverse que l'humanité elle-même. Personne ne songerait à imposer de ségrégation dans les immeubles. Pourquoi devrions-nous la subir ? Aurions-nous cessé d'être humains pour qu'on nous parque, les hommes d'un côté, les femmes de l'autre ?
4. Il faut abolir les dortoirs, pour respecter le droit à l'intimité des exclus. Là encore, il s'agit d'un principe élémentaire. Ces dortoirs ne nous permettent pas de sortir de la rue, ils nous y renvoient. Il nous font comprendre que nous ne sommes rien, que du bétail que l'on parque pour la nuit, et ils attisent notre révolte.
5. Chaque centre doit être pourvu de chambres d'enfants, afin que l'exclu qui y a résidence puisse exercer son droit parental en cas de séparation. L'une des raisons majeures qui conduisent un gars dans la rue est un divorce malheureux suivi d'une séparation d'avec ses enfants. Or les conditions qui lui sont faites dans la rue sont telles que très vite il se trouve dans l'impossibilité d'exercer son droit de garde et que ce qui l'avait provisoirement poussé à la rue devient, pour lui, une condamnation définitive.
6. En période d'hiver, il faut que l'on puisse partir vers dix heures et non vers sept heures comme c'est le cas actuellement. On m'explique qu'on nous jette dehors pour le ménage. C'est un faux problème. Il suffit de prévoir une pièce où l'on pourrait se rassembler et libérer ainsi les parties communes.
7. Il doit y avoir une meilleure formation du personnel, notamment des gardiens de nuit, et que le personnel associatif nous manifeste plus d'humanité. Qu'il nous accepte comme nous sommes, hommes et femmes, et qu'il arrête de nous traiter en irresponsables ou en « criminels ». Tout le monde sait que se retrouver à la rue n'est pas un crime. Pourtant, les règlements et les comportements à notre égard ressemblent étrangement à ceux des prisons ou des maisons de redressement. Est-ce la meilleure manière pour nous aider ?
8. Il est nécessaire que les centres conservent des dimensions humaines, destinés à recevoir entre vingt-cinq et quarante personnes. Comme pour les quinze jours ou les dortoirs, cette exigence a pour but de permettre à l'exclu de se sentir mieux, considéré comme un homme et pas comme une bête, et ainsi de pouvoir commencer sa reconstruction.
9. Il faut que le personnel minimal soit constitué par : un psychologue, un alcoologue, un médecin, une assistante sociale pour remplacer les matons qui nous répriment. De deux choses l'une : soit on veut nous aider à nous sortir de notre misère, soit on se contente de la gérer. Mais si on choisit de simplement la gérer, notre misère va coûter beaucoup plus cher à la collectivité, puisque, en agissant ainsi, on nous maintient dans la rue à vie. Il est vrai que la rue ne fait pas de cadeaux et que nous y mourons. Mais alors, il faut avoir le courage de l'avouer : nous gérons votre misère jusqu'à ce que vous creviez.
10. Chaque centre dit « d'urgence » doit être pourvu d'un lieu adéquat pour pallier la clochardisation à l'extrême et éviter la ghettoïsation. Il y a malheureusement toutes les sortes de dégradations dans la rue. Certains d'entre nous se trouvent dans des états si déplorables que même nous, nous avons du mal à les accepter. Faut-il pour cela les abandonner ? Ce sont nos frères sur lesquels le malheur s'est acharné.
11. Il faut que ces lieux soient pourvus d'un vestiaire pour pouvoir nous changer car l'exclusion fait que nos habits sont très endommagés, et une annexe doit être créée près du centre pour le repas de midi, afin d'éviter l'éloignement qui remet en cause la réadaptation. Le premier problème du clochard est l'absence de repères, l'instabilité. Occupés à courir partout pour régler nos problèmes, nos papiers, pour trouver de quoi manger et où dormir, nous menons une existence de bête traquée. Nous qui n'avons rien, aucun endroit pour nous reposer, pourquoi nous obliger encore à traverser la ville pour manger, nous habiller ou dormir ? Enfin, pour éviter la surconsommation d'alcool pendant l'attente avant d'entrer au centre -où par conséquent les exclus boivent avec excès-, il faut qu'ils puissent boire en mangeant. C'est une question de vie ou de mort. L'interdiction d'alcool dans les foyers est un règlement hypocrite qu'il faut casser. Tout le monde sait très bien qu'une fois hors du foyer, tous ceux à qui on a interdit de boire vont picoler encore plus.
Voilà quelques-unes des réformes, du simple bon sens, qu'il faudrait appliquer aux asiles de nuit et qui apporteraient, dans les faits, cette humanisation."
Merci Nico, il est super ton post. (Dis tu as combien de blogs en vérité ???. Sur Champ G j'ai posté hier ou avant hier.
Rédigé par : NGK | 20 avril 2006 à 21:33
"Dis tu as combien de blogs en vérité ???"
> nuesweb, nuesbreve et l'hebdo nuesblog... dans 15 jours tout cela et d'autres sources ne feront plus qu'un ;)
ChampG > oups, ce doit être les caractères rouges et gras de ta note qui m'ont fait la manquer (hihihi)
Rédigé par : Nico | 20 avril 2006 à 22:07
Mouais...
J'ai l'impression que ce qu'il demande c'est de transformer les centres d'accueil en imeubles d'habitation pour que les exclus puisssent y vivre à temps plein et qu'en plus lesdits immeubles doivent comporter tout ce qu'il leur faut d'assistantes, médecins et autres pour qu'ils n'aient même plus à en sortir. Et puis on leur remplit leur demande de RMI, on leur apporte des cartons d'aide alimentaire (avec le cubi de piquette hein, faut pas oublier... et puis dans 2 mois faudra un cubi de whisky 15 ans d'âge, ancienneté oblige), et voilà ils seront bienheureux ces nouveaux pachas.
Ou comment sur-assister les gens, quoi...
Qu'on humanise ces endroits et qu'on réfléchisse un peu mieux aux besoins de ces gens pour leur fournir une aide plus adaptée, je suis d'accord.
Pour le reste, je sais pas... J'ai déjà du mal avec les RMIstes que je connais qui ne cherchent même pas de travail et vivent plus confortablement que moi quand je bosse et plus tranquillement que moi quand je bosse pas et que je cours partout à la recherche d'une semaine d'intérim payée au SMIC... Qui peuvent se faire soigner sans débourser un centime quand moi je supporte la douleur en attendant qu'un jour ça passe... Bref, ça m'écoeure de connaitre ces personnes là. Elles érigent le RMI en solution de facilité et comptent bien dessus pour vivre tranquillement jusqu'à leurs 90 ans.
Alors si maintenant il suffit d'aller dans la rue en haillons pour qu'on s'occupe d'elles encore plus et encore mieux, pourquoi ne se gênraient-elles pas ?
Les dérives sont si vite arrivées de nos jours...
Rédigé par : Fanny | 21 avril 2006 à 10:43
Ah oui, t'es remontée là !
on oublie aujourd'hui que le rmi était initialement conditionné par des démarches de recherche d'emploi et d'insertion. En effet.
Mais as-tu hier soir croisé cette émission de France 2 (envoyé très spécial ?) qui se penchait sur la pauvreté made in France ? Il serait dramatique de ne pas voir la vraie misère sous couvert de (humhum) "misère de confort", dont je ne doute pas qu'elle existe, mais qui n'est que la minime et bruyante face immergée de l'iceberg précarité. Le débat est donc ouvert...
Rédigé par : Nico | 21 avril 2006 à 10:51
Comme tu dis, je suis remontée !
Mais ça m'énerve au plus haut point quand, lorsque de bonnes âmes cherchent à aider ceux qui sont tombés dans la mélasse par mégarde ou parce qu'on les y a poussés, on peut voir des paresseux venir profiter et parasiter le système.
Le français est champion du monde pour aller chercher tous les avantages possibles à tous les râteliers sans jamais vouloir les inconvénients qui vont avec...
Donc mettre en place une aide cohérente pour sortir les exclus du bourbier où ils sont, oui, mille fois oui.
Mais plutôt que de traquer les pirates qui utilisent la mule un peu trop souvent ou d'emmerder le contribuable avec des mesures à la con, et bien on ferait mieux de traquer les faux miséreux qui font comme tu le dis si bien de la "misère de confort".
Tiens, encore un truc qui m'a fait bondir pendant les histoires de CPE : deux exemples de 2 jeunes de 26 ans qui cherchent du taff, on explique bien qu'ils vivent chez leurs parents et touchent le RMI (comme argent de poche, puisque leurs parents les logent, les nourrissent, les blanchissent) par contre si tu quittes tes parents pour te mettre avec ton (ta) petit(e) ami(e) qui touche le SMIC, ben exit le RMI, tu n'y as plus droit... puisque le RMI pour un couple est de 650 euros environ. Donc en gagnant ses 1000 euros de salaire, ton conjoint t'empêche de continuer à avoir ton argent de poche.
Ca motive vachement les "Tanguy" de tous genre à quitter le cocon familial pour trouver du taff, un appart', et se mettre à payer son loyer, ses factures et à se prendre vraiment en charge, non ?
Rédigé par : Fanny | 21 avril 2006 à 14:13