La mission était sans doute impossible [img]. Toute la journée de vendredi le vieux a tendu la jambe. Le croche-patte était trop gros. Sarko l'a (à cette heure et contrairement à nombre de prédictions) enjambé. "Une prise de parole de Jacques Chirac est attendue dans les 72h" écrivais-je vendredi, après "enquête" (tout au plus 4 appels téléphoniques on ne peut plus ciblés - une enquête aurait nécessité d'aller au-delà encore). Le Chi a pris 24h de plus pour faire son allocution, et le week-end pour démentir autant que possible ce qu'il est aisé de qualifier après-coup de rumeurs. Pour finalement avouer son échec. Pardon, confirmer sa confiance au Hussard.
Que Gergorin soit un proche de DDV (et que le Chi japonise quelques profits) n'arrange personne [EDIT > voir ce billet de BigBangBlog]. Enfin personne... Hier soir, Ségo et Sarko ont lancé leurs campagnes [voir 'podcast-express' en colonne de droite]. Mardi François dépose sa motion de censure. Le borgne aurait [de source farfelue] eu une érection. Et les juges ont repris leur travail, interrompu la semaine dernière. Le Monde (le journal), La France (nous), le Gouvernement (Dominique ton mandat) continuent de jouer leur peau dans un combat contre le pot de fer des officines de délocalisation d'intérêt. Rebonds perpétuels... Une seule chose est certaine, les guerres entre industriels, politiques ou titres de presse continueront d'alimenter ce néologisme fourre-tout : "les affaires". Et quand les affaires vont bien...
EDIT > "Jacques Chirac tient la corde qui soutient le pendu. Dans ce contexte, ces mots n'ont pas de sens. Il s'est passé la même chose avec Nixon. La veille de sa démission, il prétendait rester jusqu'à la fin de son mandat (...)" Airy Routier, rédacteur en chef du service Enquête au Nouvel Observateur et Simon Piel, entretien à lire ici (et ci-dessous).
"Chirac tient la corde
qui soutient le pendu"
NOUVELOBS.COM | 10.05.06 | 13:29
par Airy Routier,
rédacteur en chef du service Enquête au Nouvel Observateur
Après les dernières révélations du Canard Enchainé, l'étau semble se resserrer autour de Jean-Louis Gergorin, qui serait, selon l'hebdomadaire, le corbeau. Par ailleurs, le n°2 d'EADS réitère qu'il n'est ni l'auteur, ni l'expéditeur des lettres adressées plus tard au juge Van Ruymbeke, et dément avoir rencontré le juge le 30 avril 2004. Il affirme réserver ses déclarations aux juges d'instruction, quelle pourra être sa défense? Le juge Van Ruymbeke pourra-t'il être entendu par les juges d'instruction sur la teneur des propos tenus le 30 avril 2004 ?
-Toute la logique, le déroulement des faits et le caractère fantasque de Gergorin poussent à penser qu'il a transmis le listing au juge Van Ruymbeke sous forme de lettre anonyme. L'anonymat de la lettre se justifie par le caractère un peu parano de Gergorin qui a dit craindre pour sa vie. On peut imaginer que Ruymbeke lui a demandé d'envoyer des lettres anonymes pour garantir ses propos. On sait depuis quelques jours que le juge Van Ruymbeke avait un rôle peu clair. Il a envoyé une commission rogatoire de vingt pages au Luxembourg reprenant les termes de la lettres anonyme, une heure après la réception de cette dernière.
Il est donc clair que le juge Van Ruymbeke avait les éléments de la lettre avant. De son côté, Gergorin nie avoir envoyé la lettre. On peut lui faire ce crédit car, en théorie, ce peut toujours être les autres détenteurs de la liste et même le juge. On peut imaginer, en effet, que le juge Van Ruymbeke se soit envoyé la lettre lui-même. C'était une pratique courante des juges dans les années 1980. Mais ce sont des hypothèses extrêmement ténues par rapport à celle qui fait de Gergorin le tireur de ficelle, qui pour nuire aux armements de Lagardère et dans le cadre des batailles internes au groupe EADS donne ses listes à Villepin puis au juge Van Ruymbeke via une lettre anonyme. Le juge Van Ruymbeke va être entendu par les juges, avec lesquels il entretient des rapports tendus. Une question se pose. On est dans la désinformation sur les problèmes de l'industrie d'armement. Selon Van Ruymbeke, la liste que montre Gergorin ne met pas en cause les politiques. Concernant les autres listes, rien ne dit qu'elles ont été envoyées par Gergorin. Il peut y avoir d'autres corbeaux.
Il y avait, en toile de fond de l'affaire Clearstream, une guerre de succession à la tête du groupe EADS en 2004. Quel est le rôle de Jean-Louis Gergorin dans ce conflit interne et l'importance de cette guerre de succession dans le déclenchement de l'affaire ?
- A l'époque, il y a Philippe Camus, co-président d'EADS, et Noël Forgeard, président d'Airbus qui n'a de cesse de vouloir prendre la place de Camus avec le soutien de Chirac dont il a été conseiller industriel à Matignon. Camus est soutenu par Gergorin, Forgeard par Philippe Delmas, son bras droit. Tout laisse à penser que la première liste où des noms ont été rajoutés a pour but de disqualifier Forgeard par le biais de Delmas ainsi que les concurrents de Lagardère, en particulier Alain Gomez, ancien patron de Thomson avec laquelle le groupe Lagardère entretient des rapports d'une violence inouïe.
Jacques Chirac a déclaré, ce mercredi 10 mai, que "la République, ce n'est pas la dictature de la rumeur, la dictature de la calomnie" et réaffirmé son soutien à Dominique de Villepin.
Comment interprétez-vous cette première déclaration du chef de l'Etat sur l'affaire Clearstream, bien qu'il n'en ait pas prononcé le nom ? Pourquoi continue-t'il à soutenir son Premier ministre ?
- Jacques Chirac tient la corde qui soutient le pendu. Dans ce contexte, ces mots n'ont pas de sens. Il s'est passé la même chose avec Nixon. La veille de sa démission, il prétendait rester jusqu'à la fin de son mandat. En revanche, ce qu'on subodore des relations Chirac/Villepin, comme l'affirme Franz-Olivier Giesbert dans son livre ("La Tragédie du Président",Flammarion, mars 2006, ndlr), laisse supposer que Villepin peut tenir Chirac. Il y aurait comme un pacte, scellant des secrets partagés, qui rendrait l'éviction de Villepin difficile. Par ailleurs, par qui le remplacer? On ne peut pas tenir comme ça très longtemps. La France est la risée des pays étrangers. Les extrêmes progressent. Et Sarkozy, quoi qu'il fasse, risque d'être balayé de façon injuste dans l'opprobre générale, vis-à-vis de la façon dont la droite gouverne.
Propos recueillis par Simon Piel
(le mercredi 10 mai 2006)
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